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Vendre son cabinet d’expertise comptable : y a-t-il un timing idéal ?

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Vendre son cabinet d’expertise comptable : y a-t-il un timing idéal ?
Vendre son cabinet d’expertise comptable : y a-t-il un timing idéal ?

Penser à céder son affaire fait partie des réflexions naturelles de tout entrepreneur et la question se posera un jour ou l’autre à tous les experts-comptables indépendants. Elle soulève des interrogations quant à son timing : y a-t-il un moment à privilégier pour mettre en vente son cabinet ? Un âge idéal ? Quid de la conjoncture économique ou politique ? Pour y voir plus clair, nous avons interrogé Laurent Charrier et Mathieu Puichault, associés du cabinet Viou & Gouron.

Y a-t-il un âge idéal pour céder son cabinet ?

Laurent Charrier : L’âge du dirigeant et les éventuelles différences d’âge entre les associés constituent des données structurelles indépassables. L’horloge interne du vendeur présente un avantage : la prévisibilité. Mais elle peut se dérégler, pour cause d’impératifs (santé, famille…), de nouveaux projets professionnels, ou de tensions internes. Dans un tel cas, le bon moment sera forcément… tout de suite.

Mathieu Puichault : Il faut également noter que les cessions de cabinets d’expertise-comptable ne se limitent plus aux départs en retraite de leurs dirigeants. C’était autrefois le cas dans 90 % des cas mais il y a eu un vrai basculement et aujourd’hui, beaucoup des vendeurs que nous rencontrons ont plutôt 40 ans ! Certains sont lassés par la profession, d’autres sont animés par la volonté d’apporter à leurs clients de nouvelles missions de conseils et recherchent un rassemblement de forces et de moyens qu’ils peinent à déployer seuls.

D’un point de vue stratégique, en quoi les transformations sociétales, managériales ou digitales sont-elles de nature à influencer les décisions en matière de fusion ou de cession ? Quelles sont les bonnes questions à se poser en amont ?

M.P : Toute entreprise connaît des cycles. Croissance, plateau, diversification, coups durs, se succèdent au fil des ans – c’est la loi des affaires. Les experts-comptables ont en général une vision assez précise de leurs revenus de l’année à venir. Mais bien entendu ils prennent aussi conscience des nouveaux moyens que réclament les transformations en cours dans leur profession. Seront-ils de force pour aborder une concurrence diversifiée et durcie ? Comment va se passer la mise en place de la facture électronique ? Comment produire des services à plus forte valeur ajoutée que les écritures et le déclaratif ? Comment automatiser sans se ruiner ? Les petits cabinets ont-ils encore un avenir ?

L.C : En effet, ces d’interrogations encouragent à envisager un rapprochement stratégique, si l’on souhaite rester, ou un départ, y compris anticipé. Selon la taille du cabinet et la personnalité de ses dirigeants, il choisira de vendre tout ou partie de ses parts afin d’intégrer un cabinet plus grand, mieux équipé du point de vue informatique, RH, marketing, etc.

Quels sont les facteurs externes qui influent actuellement sur la valorisation et la vente des cabinets d’expertise-comptable en France ?

M.P : Il y a de nombreux éléments conjoncturels, indépendants de la volonté du vendeur, qui pourront -devront- être pris en compte pour évaluer l’opportunité de céder son cabinet. On pense notamment à la conjoncture politique et aux circonstances économique qui influent, par exemple, sur les taux d’intérêts ou la propension des banques à prêter. Par ailleurs, nous traversons actuellement une période d’instabilité réglementaire que l’on voit mal se stabiliser à court terme. Ainsi qu’une immense difficulté à recruter, faute d’attractivité de la profession.

L.C : Un autre facteur très influent est bien sur la loi de l’offre et de la demande qui fait entendre sa voix. Il y a aujourd’hui en France de nombreux cabinets vendeurs, mais il y a plus encore de candidats à leur rachat et un intérêt croissant des fonds de Private equity pour la profession comptable. La situation est aujourd’hui à l’avantage des vendeurs, assurés de trouver preneur et même de pouvoir sélectionner celui qui apparaîtra comme le meilleur candidat. Mais cette situation ne sera pas éternelle...

La grande majorité des entreprises déposent leurs comptes en même temps dans l’année. Comment s’organise le calendrier idéal de cession ?

L.C : Plus que beaucoup d’autres, la profession comptable est assujettie à une forte saisonnalité de son activité et c’est naturellement par rapport à la période fiscale que s’organise un calendrier idéal. La grande majorité des prises d’effet ont lieu au second semestre, et plus particulièrement à l’automne. Il y a de bonnes raisons à ce choix. Il permet de se consacrer à l’intégration du cabinet racheté et de profiter de l’accompagnement du cédant (généralement 3 mois) avant le début de la nouvelle période fiscale. Sachant qu’il faut compter de 6 à 9 mois pour conclure une vente, on en déduira qu’il faut idéalement lancer la vente du cabinet en fin d’année ou en janvier. Ce n’est toutefois pas l’avis de tout le monde. Certains pensent que le meilleur moment pour la transmission serait la présentation des bilans, qui permet d’introduire le repreneur aux clients à l’occasion de réunions programmées. Avec ce calendrier, la prise d’effet de la vente se situe en pleine période fiscale, ce qui présente des avantages (le nouvel arrivant entre tout de suite dans le concret) et des inconvénients (le manque de temps). Dans ce cas, la mise en vente du cabinet interviendra entre juin et octobre.

M.P : Il n’y a pas, à mon sens, de schéma préétabli. Nous avons réalisé de belles ventes et des rapprochements réussis à toute époque de l’année. Le calendrier idéal est connu, mais la mise en œuvre reste souple, par exemple en ce qui concerne la durée de l’accompagnement du sortant. Une opération peut très bien avoir été bouclée en mars et prendre effet en septembre. Il n’y a pas de bon ou de mauvais moment ; ce qui compte c’est le moment où l’on prend la décision de vendre son cabinet. Il ne faut pas laisser le temps s’imposer à soi.

Quels conseils donneriez-vous à un cédant pour s’assurer que ses clients soient bien pris en charge par le repreneur ?

L.C : Tout d’abord, le cédant doit réellement accompagner son successeur pour lui permettre de créer une relation de confiance très rapidement avec ses clients. Derrière les chiffres, ce métier est avant tout une histoire de relation humaine. Lorsque la structure du cabinet le permet, l’idéal est de pouvoir organiser ses équipes par pôles avec des responsables de clientèle intermédiaire pour sécuriser la passation de la clientèle.

M.P : Il est important également de pouvoir expliquer la spécificité de chaque client, son histoire et ses problématiques. Cela ne s’applique pas forcément à toute typologie de clientèle mais notre conseil est d’être disponible pour que la passation se réalise dans de meilleures conditions. La transmission ne s’arrête pas le jour de la signature de l’acte définitif, elle débute.

Quels sont les principaux éléments à valoriser avant de mettre en vente ?

L.C : Je dirais que la richesse d’un cabinet tient, avant tout, à la qualité de ses collaborateurs, qui portent l’histoire du cabinet et l’esprit de celui-ci dans sa relation avec les clients. On dit souvent que nous avons des clients qui nous ressemblent, mais nous avons aussi, plus encore, des collaborateurs qui nous ressemblent ! Des équipes impliquées professionnellement et dans la relation avec la clientèle sont un élément essentiel dans la qualité de service offerte aux clients.

M.P : Un autre élément essentiel est la digitalisation qui devient de plus en plus un levier de performance aussi bien dans le traitement technique des dossiers que dans la relation clientèle et la mise à disposition d’informations comptables et financières presque en temps réel. Réussir à valoriser ces deux éléments, la technique au service de la production et de la clientèle sans perdre la relation humaine est, je pense une question qui va dans un avenir proche impacter la valorisation des cabinets.

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